Mieux comprendre l’infestation des parasites digestifs

Mieux comprendre l’infestation des parasites digestifs

Les parasites digestifs représentent un réel danger pour la santé de nos chevaux. D’après le réseau d'épidémio-surveillance en pathologie équine, en Normandie, ces derniers occasionnent 4 à 9% des décès de chevaux et représentent la principale cause de coliques. Afin de pouvoir les contrôler et d’appliquer un protocole de vermifugation raisonnée, il est important de comprendre et de connaître leur fonctionnement.

I- L’infestation par les parasites

Les œufs des parasites sont excrétés hors de l’animal par les crottins. 48 h après avoir été évacué de l’organisme de l’animal, si les conditions climatiques sont optimales (25°C, 80% d’humidité), les larves sortent des œufs. Ces larves migrent des crottins vers l’herbe et peuvent survivre plusieurs semaines dans l’environnement extérieur. En broutant, le cheval ingère les larves. Une fois dans l’organisme du cheval, les larves s’accouplent et pondent leurs œufs dans le caecum (organe de l’appareil digestif correspondant à la première partie du gros intestin) et le gros intestin du cheval qui se retrouveront ensuite dans les crottins. 

Illustration : Schéma infestation par les parasites - Source : © Gardes

II-Les principaux parasites digestifs

1) Les petits strongles

De nos jours, les petits strongles sont considérés comme les parasites intestinaux les plus fréquents chez le cheval, mais aussi les plus problématiques, car ils ont développé des résistances considérables aux vermifuges.

Dans les crottins, les larves sont protégées des rayons UV et des variations de températures. Pour leur développement, les larves ont besoin de température élevé. Lorsque les conditions sont humides, elles migrent vers la pâture et sont ingérées par les chevaux.

Ces vers ronds vivent dans le gros intestin et sont capables de s’enkyster dans la paroi intestinale afin de survivre dans des conditions hivernales qui leur sont défavorables. À l'intérieur de la muqueuse de l'intestin, les larves interrompent leur cycle de développement et rentrent dans une sorte d'hibernation. Ces larves enkystées sont en grande partie responsables d’amaigrissement, de diarrhée, d’œdèmes déclives et parfois même de coliques.


Illustration : Larves de petits strongles enkystées dans la paroi de l'intestin - Source : © Anses

Il est important de traiter les chevaux contre les petits strongles durant la saison de pâturage, mais également en automne, lorsque les larves sont enkystées. Plusieurs molécules antiparasitaires sont actives contre les petits strongles. Cependant, ces derniers ont développé des résistances contre le pyrantel et les benzimidazoles. Par conséquent, il est important de limiter la lutte anti-parasitaire aux vermifuges, mais aussi de mettre en place des analyses de crottins à l’écurie et au pré.

2) Les vers plats ou ténias 

Il existe trois espèces de ténias qui peuvent parasiter nos chevaux. Reconnaissable par leurs nombreux anneaux, ces vers plats infestent les chevaux qui vivent au pré entre le début du printemps et la fin de l’automne. Une fois libérés, les œufs de ce ver sont ingérés par des oribatides, des acariens présents dans les pâtures. Les chevaux s’infestent en broutant et en ingérant ces derniers. Les infestations par les ténias peuvent provoquer des coliques, mais elles pourraient également être responsables de troubles diarrhéiques et de tumeurs bénignes de l'intestin. 

Vous pouvez observer des œufs ou bien des paquets de vers dans les crottins. La présence de ce parasite peut également être détectée grâce à une analyse de crottins (coproscopie). Les traitements pour les vers plats sont conseillés pour tous les chevaux de plus de 6 mois, vivant à l’extérieur. Ce traitement doit être réalisé après le premier gel, à la fin de l’automne. Deux molécules sont efficaces contre les ténias : le praziquantel et le pyrantel.

Illustration : Ténia adulte dans un crottin - Source : © P. Doligez

3) Les larves de gastérophiles

Illustration : Œufs de gastérophiles collés sur les poils d'un membre antérieur - Source : © C. Lebis

Ces larves sont localisées dans l’estomac du cheval. Les larves deviennent des mouches qui pondent leurs œufs sur les membres des chevaux. Le cheval s’infeste en se grattant ou en léchant l’endroit où sont accrochés les œufs. En prévention, nous vous conseillons de retirer régulièrement les œufs jaunes accrochés sur les poils des chevaux. Le couteau à œufs de mouches doté d’une lame incurvée à dents est l’outil idéal pour s’en débarrasser.


Illustration : Larves de gastérophiles dans l'estomac d'un cheval - Source : © Laboratoire de parasitologie équine de Dozulé

En grande quantité, ces larves peuvent être responsables de coliques. Ces parasites ne peuvent pas être détectés par un examen des crottins, mais certains antiparasitaires tels que la moxidectine et l’Ivermectine permettent d’éliminer les larves. Le traitement vermicide doit être administré en automne, lorsque les adultes ont disparu.

4) Les Oxyures

Les oxyures sont des vers ronds qui vivent dans le gros intestin. L’infestation est plus fréquente chez les chevaux vivant en box. Les femelles pondent des œufs dans un gel qui provoque des démangeaisons. Les œufs ne sont pas détectables dans les crottins, ils sont visibles autour de l’anus.

Illustration : Queue ébouriffée d'un cheval atteint d'oxyurose - Source : © ESCCAP

L’infestation par ce ver se remarque par l’aspect ébouriffé des crins de la queue, lorsque votre cheval se frotte et se gratte anormalement la queue. Dans ce cas, nous vous recommandons de consulter un vétérinaire. La grande majorité des vermifuges actuels sont efficaces contre les oxyures.

Illustration : Oxyure - Source : © Parasitologie EnvA

5) Les vers Dictyocaulus ou vers pulmonaires

Illustration: Chevaux détenus avec un âne - Source : © F. Muhammad

Les dictyocaules sont des vers qui peuvent mesurer jusqu’à 6 cm. Les adultes de ce parasite vivent et pondent des œufs dans les petites bronches des équidés. Les œufs remontent jusqu'au pharynx avec le mucus respiratoire puis sont déglutis afin d’être excrétés dans les crottins. L’infestation par des vers pulmonaires est relativement rare chez les chevaux. Elle se manifeste généralement lorsque votre cheval est détenu avec un ou plusieurs ânes. Ces derniers servent de réservoirs pour cet agent pathogène. La plupart des animaux contaminés n'expriment aucun signe de maladie. Cependant, certains d’entre eux peuvent présenter des signes d’infestations tels qu’une toux persistante, un écoulement nasal, une respiration anormale…

La mise en évidence des œufs ou des larves de dictyocaules dans les crottins nécessite une observation microscopique. Cet examen n’est pas toujours révélateur. Par ailleurs, ces parasites peuvent être mis en évidence dans un prélèvement de mucus trachéal. Ces vers sont sensibles aux mêmes vermifuges que les strongles. Si votre cheval a été en contact avec des ânes et présente des symptômes, il faut alors consulter votre vétérinaire.

Illustration: Adultes de Dictyocaulus- Source : © Parasitologie EnvA

6) Les Ascaris

Illustration : Ascaris adultes - Source : © A. Meana

Les Ascaris sont des vers blancs et ronds pouvant mesurer jusqu’à 25 cm de long et 5 mm de diamètre. Ces derniers se fixent à la paroi de l’intestin grêle et se nourrissent du contenu intestinal. Une femelle peut pondre jusqu’à 20 000 œufs par jour. Ces œufs sont très résistants et peuvent survivre très longtemps. Lorsque les conditions sont favorables, les œufs évoluent pour donner des larves qui resteront à l’intérieur de l’œuf jusqu’à être ingérées par l’animal. Après l’éclosion et à la suite de plusieurs migrations dans l’organisme du cheval, leur cycle interne de 10 à 12 semaines s’achève dans l’intestin grêle.

Lorsque de nombreux vers adultes sont présents dans l’intestin, il existe un risque d'obstruction ou de torsion de l’intestin grêle. Les chevaux atteints sont principalement les jeunes chevaux, de moins de deux ans. La toux, la fièvre, le manque d’appétit, le ralentissement de la croissance, la diarrhée et les coliques sont des signes cliniques qui peuvent survenir lors d’une infestation.

Nous vous conseillons de ne pas attendre une infestation massive pour traiter les poulains. En effet, la vermifugation d’un cheval très fortement parasité provoque une libération de toxines qui peuvent s’avérer mortelles. De nombreux vermifuges actuels sont efficaces contre les ascaris, cependant, des résistances commencent à émerger. Nous vous recommandons d'effectuer un contrôle par coproscopie 14 jours après le traitement pour vérifier son efficacité.

7) La Douve du foie

Illustration: Pâturage mixte - Source : © Jan Erik Engan

La douve du foie est un parasite infestant fréquemment les ruminants domestiques, mais pouvant aussi se transmettre aux chevaux lors de pâturage mixte. Les ruminants ou autres herbivores sauvages excrètent les œufs dans leurs fèces. Les œufs se transforment en larves, puis celles-ci pénètrent dans une liminée (mollusque d’eau douce). Dans cet hôte, elles se multiplient avant de ressortir et de se fixer à la végétation. C’est en broutant celle-ci que les équidés peuvent s’infester. Une fois ingérés, ces parasites migrent vers le foie et vivent dans les canaux biliaires (tubes qui transportent la bile du foie à l’intestin grêle).

Les conditions pour le développement de la douve du foie sont des prés humides, proches de mares ou de cours d’eaux stagnants. En effet, les limnées, indispensables à leur développement, vivent dans des milieux humides ou semi-aquatiques. Finalement, un environnement humide, un pâturage mixte avec des ruminants, une proximité avec des herbivores sauvages (ragondins, cervidés…) et un climat doux et pluvieux augmentent les risques d’infestation. L'infestation des chevaux par la douve reste cependant rare et son impact sur leur santé est encore mal connu. Elle peut se manifester par une baisse de forme, d’appétit, d’amaigrissement, de poils piqué.

La mise en évidence de ces parasites repose sur la réalisation d’une coproscopie. En cas de diagnostic, votre vétérinaire pourra administrer un vermifuge habituellement destiné aux ruminants. Des cas de résistance ayant été observés, ces traitements doivent être utilisés seulement en cas de forte suspicion.